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3 questions à Liza Henshaw et Friederike Röder, Présidente et Vice-Présidente de Global Citizen

Publié le 16 juin 2023 dans Actualités

Les 22 et 23 juin 2023, un Sommet pour un nouveau pacte financier mondial se tiendra à Paris, organisé par la France. De nombreux dirigeant·e·s d’États, de gouvernements, d’organisations internationales, de la société civile et du secteur privé seront invités à discuter des solutions de financement du développement mondial et de la transition climatique. 

Afin de décrypter les enjeux de ce Sommet, Focus 2030 souhaite recueillir et mettre en avant le point de vue d’organisations expertes dans leurs domaines respectifs et réalise une série d’entretiens avec des représentants de gouvernements, d’organisations internationales, d’ONG, de think tanks, etc. 

Découvrez le dossier spécial sur le Sommet, ainsi que l’ensemble des autres entretiens avec des expert·e·s, personnalités et acteurs de la solidarité internationale en amont de l’évènement.

 

3 questions à Liza Henshaw et Friederike Röder, Présidente et Vice-Présidente de Global Citizen

Propos recueillis le 14 juin 2023 par Focus 2030.

Focus 2030 : Global Citizen a récemment lancé la campagne « Power Our Planet : Act Today. Save Tomorrow ». Cette initiative mondiale, coprésidée par Mia Mottley, première ministre de la Barbade, vise à mobiliser des fonds essentiels pour les pays en développement afin de lutter contre les changements climatiques et l’extrême pauvreté. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette campagne ? Comment les citoyens et citoyennes peuvent-ils s’impliquer ? Que pouvez-vous dire de l’événement que vous organiserez à Paris lors du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial ?

 

Liza Henshaw et Friederike Röder : Nous avons annoncé en avril le lancement de la campagne «  Power Our Planet  », qui vise à fournir aux pays pauvres et vulnérables plus de solidité financière et un meilleur accès à des solutions de financement afin qu’ils puissent plus rapidement adopter des énergies propres et faire face aux catastrophes naturelles. Cette campagne englobe le G7 en mai, le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial à Paris en juin, le G20 et l’Assemblée générale des Nations unies en septembre, et la COP28 en novembre. La campagne «  Power Our Planet  » se déroulera parallèlement à notre campagne «  End Extreme Poverty NOW  », qui occupera le devant de la scène à New York lors du Global Citizen Festival.

Tout au long de l’année, avec les Global Citizens et les artistes internationaux, nous demanderons aux dirigeants mondiaux, aux banques multilatérales de développement, aux philanthropes et aux responsables du secteur privé de prendre des engagements ambitieux pour débloquer des fonds essentiels, d’investir dans la transition verte afin de maintenir le réchauffement climatique en dessous de 1,5 degré et d’accroître le soutien aux pays les plus pauvres pour remédier aux inégalités en matière de santé, d’éducation et de lutte contre la pauvreté. Nous demanderons aux actionnaires de la Banque mondiale et aux autres pays riches de procéder à des réformes ambitieuses afin de débloquer davantage de fonds et de faire des changements climatiques une priorité au même titre que l’éradication de la pauvreté.

Pour soutenir cette campagne, pousser au changement et exiger des actions de la part des dirigeants mondiaux et des institutions financières, vous pouvez vous joindre à l’appel et vous impliquer en rejoignant le mouvement sur globalcitizen.org, en téléchargeant l’application Global Citizen et en suivant Global Citizen sur Facebook, Instagram, LinkedIn, TikTok et Twitter.

Dans le cadre de cette campagne, Global Citizen organisera un événement à Paris lors du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, le 22 juin, sur le Champs de Mars, en face de la Tour Eiffel. «  Power Our Planet : Live in Paris  » est un événement gratuit accessible sur billet, au cours duquel se produiront Lenny Kravitz, Billie Eilish, H.E.R., Jon Batiste, ainsi que les invités spéciaux FINNEAS et Mosimann. Nous appelons à des engagements forts de la part du nouveau président de la Banque mondiale, Ajay Banga, de la secrétaire d’État américaine au Trésor, Janet Yellen, et d’autres dirigeants et ministres des pays du G20 lors du Sommet pour un nouveau pacte financier, organisé par le président français Emmanuel Macron, à Paris les 22 et 23 juin. Nous espérons que cet événement encouragera les décideurs et conduira à des progrès réels. Car c’est maintenant que les promesses doivent être tenues et que des mesures doivent être prises. Pas demain.


Focus 2030 : Parmi les solutions proposées pour financer la lutte contre les changements climatiques et l’extrême pauvreté, les discussions ont tourné autour de la réallocation des droits de tirage spéciaux (DTS) alloués par le FMI en 2021 vers les pays en développement. Pensez-vous que le sommet pour un nouveau pacte financier mondial puisse permettre d’avancer sur cette question ?

 

Liza Henshaw et Friederike Röder : Nous pensons qu’il le peut, oui, mais nous ne sommes pas sûrs qu’il le fera.

Bien que le FMI ait émis 650 milliards de dollars en DTS en 2021, dans un contexte d’inquiétude économique mondiale due à la pandémie de Covid-19, les 44 pays les plus pauvres du monde n’ont reçu que 7 % de ces DTS. C’est pourquoi, en 2021, le G7 et le G20 ont approuvé un objectif mondial visant à transférer au moins 100 milliards de dollars en DTS vers les pays les plus pauvres. Pourtant, cet engagement n’a pas été tenu.
Le sommet pour un nouveau pacte financier mondial doit donc permettre d’avancer sur cette question. D’ici la fin de l’année, les pays riches devraient atteindre l’objectif de réallocation de 100 milliards de dollars, sans compter sur la contribution des États-Unis. La Maison Blanche a accepté de réaffecter 21 milliards de dollars en DTS, mais le Congrès s’y oppose. En effet, les États-Unis ne devraient pas servir de prétexte aux autres pays riches, en particulier aux membres du G20 et de l’UE, pour ne pas tenir leur promesse.


Focus 2030 : Si le sommet pour un nouveau pacte financier mondial devait déboucher sur un seul résultat, lequel choisiriez-vous ? Et quelles seront les prochaines étapes ?

 

Liza Henshaw et Friederike Röder : Nous avons besoin d’une réforme de la Banque mondiale, d’une réallocation des DTS, d’un accord sur la dette, mais en fin de compte, nous avons aussi besoin de subventions supplémentaires, et pas seulement de prêts et de mécanismes reposant sur les marchés de capitaux. Par conséquent, si nous devions choisir un résultat à ce sommet, ce serait de mobiliser des financements supplémentaires à travers une taxe internationale. Le sommet pour un nouveau pacte financier mondial en juin doit être un moment crucial pour poser les bases d’un ensemble de taxes de solidarité internationales. Ces taxes permettraient d’une part de financer la lutte contre l’extrême pauvreté et les biens publics mondiaux et d’autre part de compenser partiellement les inégalités que la mondialisation génère structurellement. Finalement, le sommet devrait être une occasion historique pour un groupe de pays pionniers de s’engager à étudier l’introduction d’une ou plusieurs taxes et de collecter par ce biais un total de 100 milliards de dollars par an en financement supplémentaire. Nous savons que trois taxes en particulier ont été discutées : la taxe sur le transport maritime, la taxe sur les combustibles fossiles et la taxe sur les transactions financières (TTF).

Ces taxes permettraient d’allouer des subventions, indispensables pour aider les pays les plus pauvres et les plus endettés et pour financer la lutte contre des problèmes dont la résolution n’est pas rentable, et qui ne peuvent donc pas être financés par des capitaux privés (par exemple, une partie des pertes et dommages ou l’adaptation aux changements climatiques, mais aussi le renforcement des systèmes de santé et la préparation à de futures pandémies).

Pour ne citer qu’un exemple, Gunther Capelle-Blancard, dans l’étude The taxation of financial transactions : an estimate of global tax revenues, montre qu’une taxe sur les transactions financières similaire à la TTF française ou au stamp duty britannique, étendue au niveau mondial, pourrait rapporter des milliards d’euros. Étendue aux pays du G20, une taxe équivalente rapporterait, malgré ses nombreuses exemptions, jusqu’à 260 milliards d’euros par an, avec un taux de 0,5 %. Cela donne une idée de ce qui est possible, sans impact sur les marchés financiers. Le sommet doit être l’occasion pour les dirigeants de voir et d’agir en grand !

 

  • Cet entretien a été traduit par Focus 2030 depuis l’anglais. Se référer à ce lien pour le consulter en version originale.
     
  • Les opinions exprimées dans cet entretien sont celles de Liza Henshaw et Friederike Röder et ne reflètent pas nécessairement les positions de Focus 2030.

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