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    Le Fonds africain de développement : canaliser des ressources concessionnelles vers les 37 pays les plus vulnérables du continent

    Publié le 03/12/2025, modifié le 18/12/2025.

    Le Fonds africain de développement (FAD), guichet concessionnel du Groupe de la Banque africaine de développement (BAD), soutient depuis 1972 les pays africains les plus vulnérables grâce à des financements à des conditions très favorables. En plus de cinquante ans d’activité, il est devenu un instrument essentiel pour accompagner 37 pays à faible revenu (dont près de la moitié sont en situation de fragilité ou de sortie de crise) dans leur trajectoire de développement économique et social.

    Depuis sa création, le FAD a investi plus de 60 milliards de dollars pour le financement de près de 3 000 projets. Ses interventions couvrent un large éventail de secteurs, en fonction des priorités des pays : infrastructures de transport et d’énergie, développement agricole, inclusion financière, gouvernance, formation et emploi, accès à l’eau et assainissement, ou encore adaptation au changement climatique.

    Alors que se tient la 17ᵉ reconstitution des ressources du Fonds africain de développement (FAD‑17), qui s’achèvera les 15 et 16 décembre prochains à Londres, les besoins exprimés par les pays bénéficiaires atteignent 25 milliards de dollars. Dans un contexte de tensions budgétaires parmi les grands bailleurs traditionnels, une question majeure se pose : la mobilisation internationale sera-t-elle à la hauteur des enjeux ?

    FONCTIONNEMENT DU FONDS AFRICAIN DE DEVELOPPEMENT

    Les pays éligibles au FAD font face à une conjonction de défis structurels : vulnérabilité accrue au changement climatique, croissance démographique rapide, niveaux d’endettement élevés, inégalités persistantes, conflits récurrents, besoins massifs en infrastructures et en services sociaux de base. Les financements du FAD constituent souvent un levier indispensable dans des contextes où l’accès aux marchés de capitaux reste limité ou trop coûteux.

    Le FAD soutient les priorités nationales de 37 pays africains à faible revenu et en situation de fragilité. Il apporte une assistance financière sous forme de dons, de prêts concessionnels, de garanties et de financements préparatoires de projets, ainsi qu’un accompagnement technique destiné à renforcer les capacités des institutions bénéficiaires, en fonction du profil économique et budgétaire de chaque pays.

    L’accès aux financements du FAD est encadré par une méthode combinant l’évaluation de la performance des politiques, projets et institutions publiques et des critères relatifs aux besoins structurels du pays (revenu par habitant, population, infrastructures…). Un dispositif spécifique est également prévu pour les États fragiles, notamment à travers la Facilité d’appui à la transition.

    Dans un contexte de tensions croissantes sur la soutenabilité des dettes souveraines, le FAD ajuste la structure de ses financements en fonction de la capacité de remboursement des pays bénéficiaires. La classification, actualisée régulièrement, est fondée sur le cadre conjoint FMI-Banque mondialed’analyse de la viabilité de la dette, où les pays à haut risque de surendettement recevront exclusivement des dons, ceux à risque modéré auront accès à un financement mixte dons/prêts, et ceux à faible risque bénéficieront de prêts uniquement, mais à des conditions très préférentielles.

    L’ensemble de ces critères permet d’orienter les allocations vers les pays où les ressources auront le plus d’effet structurant, tout en garantissant un minimum d’allocation à tous les pays éligibles afin de ne pas exclure ceux aux capacités institutionnelles encore limitées.

    Les interventions du FAD s’articulent autour des cinq grandes priorités stratégiques de la BAD, les High 5, qui déclinent les objectifs de l’Agenda 2063 de l’Union africaine et des Objectifs de développement durable des Nations unies :

    Ces axes structurent l’essentiel des projets financés, en lien étroit avec les priorités nationales des pays bénéficiaires.

    IMPACT SUR LES PAYS BÉNÉFICIAIRES

    Depuis sa création, le FAD a financé près de 3 000 projets pour un volume cumulé de plus de 60 milliards de dollars.

    Les résultats obtenus sur la seule période 2015-2024 témoignent de son rôle déterminant dans le développement des pays les plus vulnérables du continent. Le Fonds a permis à plus de 18 millions de personnes d’accéder à l’électricité, contribué à renforcer la sécurité alimentaire de 92 millions de personnes, soutenu l’accès au financement pour 580 000 entreprises, et amélioré les infrastructures de transport au bénéfice de 87 millions de personnes. Ses investissements ont également permis d’étendre les infrastructures hydrauliques pour 48 millions de bénéficiaires et d’améliorer les services d’assainissement pour 19 millions de personnes.

    Sous le cycle FAD-16 (2023-2025), le Fonds a renforcé son action en matière d’adaptation au changement climatique : 20 millions de petits exploitants ont eu accès à des technologies agricoles résilientes, 1 million d’hectares de terres dégradées ont été restaurés, et 9,5 millions de personnes ont bénéficié d’un accès à l’énergie renouvelable. En 2023, 55 % des financements du FAD ont été consacrés au climat, dont 53 % pour l’adaptation, reflétant l’alignement du Fonds avec les priorités des pays.

    Une part importante des ressources est également dédiée à des projets régionaux, notamment à travers l’Enveloppe des opérations régionales qui a déjà mobilisé 9 milliards de dollars pour des projets multinationaux. Parmi les projets emblématiques figurent la ligne ferroviaire Tanzanie-Burundi, le Corridor Trans-Gambie, ou encore les programmes d’infrastructures hydrauliques en RCA et RDC.

    RECONSTITUTION DES FINANCEMENTS FACE À DES BESOINS CROISSANTS

    Depuis 1972, les bailleurs du FAD ont reconstitué ses ressources à 16 reprises, pour un montant cumulé de 45 milliards de dollars. Lors du cycle FAD‑16 (2023–2025), des pays africains comme l’Algérie, le Maroc ou l’Afrique du Sud ont pour la première fois contribué financièrement au Fonds. Ce cycle a également introduit une enveloppe climat dédiée de 429 millions de dollars, renforçant la capacité du FAD à financer l’adaptation et la résilience face aux chocs environnementaux. Enfin, le recours à des prêts souverains concessionnels (notamment de la France et du Japon) a élargi les sources de financement, en diversifiant les modalités de soutien.

    Pour la période FAD-17 (2026–2028), les besoins exprimés atteignent 25 milliards de dollars. Ces ressources doivent permettre de soutenir la résilience climatique et d’accompagner les États fragiles. Afin d’élargir durablement sa base financière, le Conseil des gouverneurs du FAD a approuvé une réforme ambitieuse autorisant le Fonds à lever des financements non concessionnels sur les marchés internationaux. Cette réforme devrait permettre de mobiliser jusqu’à 27 milliards de dollars supplémentaires sur quinze ans, sous réserve de son adoption par 75 % des membres votants. La France a exprimé son soutien et déposé un projet de loi en ce sens.

    Dans cette dynamique, le cycle FAD-17 vise à renforcer l’impact du Fonds autour de cinq priorités stratégiques : intensifier l’action climatique en accélérant les investissements dans les énergies renouvelables, l’agriculture intelligente face au climat et les infrastructures résilientes, notamment via l’initiative Desert to Power qui ambitionne de déployer 10 000 MW d’énergie solaire au bénéfice de 250 millions de personnes ; approfondir l’intégration régionale grâce au développement d’infrastructures transfrontalières ; renforcer le capital humain en développant l’éducation, la santé et la création d’emplois, en particulier pour les femmes et les jeunes ; améliorer la gouvernance et la soutenabilité de la dette à travers un appui renforcé à la gestion des finances publiques ; et stimuler le développement du secteur privé dans les pays à faible revenu.

    La reconstitution FAD-17 apparaît ainsi essentielle pour maintenir cet élan, alors même que les bailleurs doivent composer avec un contexte marqué par des tensions géopolitiques, des contraintes budgétaires, la multiplication des crises et une concurrence croissante entre mécanismes multilatéraux. Elle constitue un signal déterminant pour soutenir des solutions éprouvées, durables et adaptées aux besoins des pays africains les plus vulnérables.

    LE SOUTIEN DE LA FRANCE

    Membre du FAD depuis 1978, la France est son 3ème contributeur historique. Lors du cycle FAD-16, elle en a été le 2ᵉ contributeur avec 560 millions d’euros engagés sur trois ans. Elle dispose de 5,33 % des droits de vote.

    Le Trésor français a mandaté le cabinet Pluricité pour évaluer l’impact de sa contribution entre 2017 et 2022. L’évaluation met en évidence :

    Sur cette même période, la contribution française aurait ainsi permis de soutenir environ 1,54 million de personnes  : 696 000 durant le cycle FAD‑14 (2017–2019) et 848 000 durant le FAD‑15 (2020–2022). Alors que plusieurs grands bailleurs réduisent fortement leur aide au développement, l’engagement français joue un rôle clé pour maintenir le niveau d’ambition du FAD et préserver sa capacité d’action. Le projet de loi de finances pour 2026 prévoit pourtant une réduction de plus de 50 % de la contribution française.

    Mise à jour – 17 décembre 2025 :

    La 17ᵉ reconstitution des ressources du Fonds africain de développement (FAD-17) a permis de réunir un montant inédit de 11 milliards de dollars auprès de 43 partenaires, couvrant une part significative des besoins estimés à 25 milliards. Cette mobilisation se distingue par un engagement accru de 19 pays africains ainsi que par la contribution de plusieurs pays arabes à travers des dispositifs de cofinancement. Une avancée majeure a également été franchie avec l’autorisation donnée au FAD de recourir, pour la première fois, aux marchés internationaux, ouvrant la voie à une capacité renforcée de mobilisation de capitaux privés et au financement de projets structurants de grande envergure. L’ensemble de ces engagements constitue une étape clé pour soutenir la résilience climatique et accompagner le développement des pays africains les plus vulnérables. Par ailleurs, 23 pays africains se sont engagés financièrement en faveur du guichet concessionnel, pour un total de 182,7 millions de dollars, dont 19 y contribuent pour la première fois.

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