Publié le 20 juin 2025 dans Sondages
Focus 2030 s’est interrogée sur la manière dont les citoyen·nes de six pays émergents et en développement perçoivent l’aide publique au développement et tout particulièrement celle de la France, en s’attachant à saisir la manière dont ils·elles considèrent l’action d’autres pays membres de la communauté internationale.
Cette enquête par sondage, commissionnée par Focus 2030 auprès de l’institut Toluna Harris Interactive, a été réalisée en ligne du 21 février au 12 mars 2025 auprès d’un panel représentatif de la population adulte selon la méthode des quotas dans les pays suivants : Bangladesh (2 014 personnes), Brésil (2 054 personnes), Égypte (2 047 personnes), Cameroun (1 593 personnes), Côte d’Ivoire (1 535 personnes) et Sénégal (908 personnes). En fonction de la distribution des réponses et compte tenu de la taille respective des échantillons selon les pays interrogés, la marge d’erreur (ou intervalle de confiance) retenue pour cette étude est de 1 % à 3,1 %.
Les données issues de ce sondage d’opinion, libres de droit, peuvent être consultées sur notre plateforme DATA 2030, permettant à chacun d’identifier plus précisément comment s’organisent les réponses, question par question et pays par pays, en prenant compte des variables sociodémographiques les plus discriminantes.
De manière générale, la France bénéficie d’une bonne image dans chacun des six pays scrutés et les citoyens considèrent que leur pays entretient de bonnes relations avec la France.
La France est identifiée comme un acteur influent pour lutter contre la pauvreté, les pandémies et le changement climatique, sans être nécessairement considérée comme un « leader » en capacité de rassembler la communauté internationale.
La France est considérée par une majorité de citoyens comme un allié des pays en développement, à des niveaux toutefois moindres que d’autres pays (États-Unis, Chine).
La corruption, le chômage et la pauvreté sont considérés comme les principaux problèmes des pays où les citoyens ont été interrogés.
Les citoyens déclarent avoir connaissance de la notion d’aide internationale pour le développement sans nécessairement en saisir les contours ni identifier précisément les plus grands pays donateurs.
L’action de la France en matière d’aide publique au développement et de partenariat est particulièrement bien identifiée dans les pays africains francophones.
L’aide internationale au développement de la France (et des autres pays) est bien accueillie par les populations de chacun de ces pays.
Les projets (ou partenariats) réalisés par la France en matière d’éducation, de santé ou d’infrastructures sont moyennement connus dans les pays africains francophones interrogés, et très peu identifiés au Brésil, en Égypte ou au Bangladesh.
L’accès à la santé, à l’éducation ainsi que la lutte contre la corruption ou contre la faim sont les principaux domaines que l’aide au développement devrait financer en priorité selon les citoyens des six pays étudiés.
Pour une majorité de citoyens, l’aide au développement a un impact positif pour leur pays et, dans une moindre mesure, pour leur situation personnelle.
ONG, entreprises et organisations religieuses locales sont considérées comme des acteurs de confiance pour améliorer les conditions de vie des populations. Une majorité de citoyens font également confiance aux ONG et aux organisations intergouvernementales internationales.
L’agence française de développement (AFD) est correctement identifiée par la moitié des personnes interrogées au Cameroun, Côte-d’Ivoire et Sénégal, tout en souffrant d’un déficit de connaissance majeur au Brésil, et conséquent en Égypte et au Bangladesh.
Après l’annonce de la suspension de l’aide internationale au développement des Etats-Unis, la Chine, la France et dans une moindre mesure l’Union européenne sont identifiés comme les principaux pays avec qui leur nation devrait entretenir des partenariats dans les différents pays scrutés par l’étude.
Ce sondage a été réalisé après l’annonce de la suppression de USAID par la nouvelle administration américaine. La notion « d’aide internationale au développement » bénéficie d’une bonne notoriété parmi les personnes interrogées dans les pays scrutés par l’étude : entre 6 et 8 personnes sur 10 déclarent en avoir déjà entendu parler, même si ce niveau de connaissance reste le plus souvent relatif.
La France bénéficie d’une bonne image dans le monde
De manière générale, la France bénéficie d’une bonne image pour plus de 70% des citoyens interrogés dans les six pays (notamment sur le continent africain) et une très grande majorité de citoyens considère que leur pays entretient de bonnes relations avec la France (76% au Sénégal) et plus encore avec l’Union européenne.
La France, un acteur attendu mais périphérique pour faire face aux grands défis planétaires
La France est identifiée comme un acteur important et attendu dans le domaine de l’aide internationale, sans être nécessairement considérée comme un « leader » en capacité de rassembler la communauté internationale pour relever les grands défis planétaires.
La France, un allié des pays en développement ?
La France est considérée par une majorité de citoyens comme un allié des pays en développement, bien en-deçà toutefois de pays comme la Chine, voire les États-Unis.
Les principaux défis des pays en développement du point de vue des citoyens
Corruption, chômage, pauvreté et inégalités sociales sont considérés comme les problèmes les plus importants auxquels font face leur pays. A titre individuel, le coût de la vie, le chômage et la pauvreté préoccupent tout particulièrement les citoyens.
La notion « d’aide internationale au développement » est également plutôt bien identifiée par les populations des pays scrutés, même si la notoriété de projets concrets reste faible : si une majorité (relative ou absolue) de citoyens de pays récipiendaires de l’APD de la France déclarent en avoir connaissance, les projets ou partenariats entre la France et leur pays ont une notoriété limitée, à l’exception des pays d’Afrique sub-saharienne où 4 à 5 personnes sur 10 déclarent en être informées.
Les ambassades de France, MSF, France 24 et selon les pays RFI bénéficient d’une notoriété importante. L’AFD est principalement identifiée dans les pays d’Afrique sub-saharienne couverts.
Résultat peut-être contre-intuitif compte-tenu des débats portés par une certaine élite, les citoyens interrogés se montrent largement favorables à l’aide internationale au développement de la France dans tous les pays scrutés, dans des proportions toutefois moindres que celle d’autres pays. Le principe de l’aide au développement, tous pays confondus, n’est pas remis en question du point de vue des citoyens.
Selon les populations des six pays interrogés, l’aide au développement devrait se concentrer en particulier dans les domaines de l’accès à la santé, l’éducation et la lutte contre la corruption.
A choisir, les citoyens aspireraient à une allocation de l’aide au développement plus souvent pour lutter contre la pauvreté que pour la protection de l’environnement et le climat même si la majorité des citoyens semblent conscients que pauvreté et climat sont deux dimensions d’un même problème à prendre en compte simultanément.
Pour une majorité de citoyens, l’APD a un impact positif pour leur pays et dans une mesure moindre pour leur situation personnelle. Toutefois près de 4 sur 10 estiment qu’elle n’a pas d’impact ou un impact négatif dans la plupart des pays interrogés (Brésil, Égypte, Côte-d’Ivoire et Sénégal).
Point d’attention : la majorité de la population des pays couverts par l’étude estime que les pays riches privilégient les pays avec lesquels ils entretiennent des liens culturels ou géographiques, dans l’allocation des ressources de l’APD. De manière contre-intuitive à nouveau compte-tenu de l’inégal accès aux vaccins durant la pandémie de Covid-19, une majorité de citoyens considère que les pays riches partagent équitablement leurs vaccins avec les pays en développement.
ONG, entreprises et organisations religieuses locales sont considérées comme des acteurs de confiance pour améliorer les conditions de vie des populations. Une majorité de citoyens font toutefois confiance aux ONG internationales et OIG.
Les raisons qui motivent les pays les plus riches à allouer une aide internationale au développement interrogent. Au Bangladesh et au Brésil, l’aide internationale est davantage perçue comme une forme de partenariat entre pays riches et pays en développement. En revanche, cette perception est plus contrastée en Côte-d’Ivoire, au Sénégal et en Égypte, entre partenariat et exercice d’une forme de domination. Résultat peut-être contre-intuitif : les plus jeunes sont, tous pays confondus, moins suspicieux que leurs aînés.
Attendre un retour économique ou diplomatique en échange d’une aide au développement est dans l’ordre des choses pour une majorité de citoyens, dans une mesure toutefois moindre au Cameroun et en Côte d’Ivoire.
La grande majorité des populations des pays interrogés considèrent qu’il est important que les valeurs de démocratie, de liberté de la presse et d’égalité entre les femmes et les hommes soient défendues par la France.
A choisir, la France devrait financer des organisations mobilisées dans la lutte contre les pandémies (sida, tuberculose, paludisme), l’éducation, l’accès aux vaccins.
Une place à prendre ? Après l’annonce de la suspension de l’aide internationale au développement des Etats-Unis, la Chine, la France et dans une moindre mesure l’Union européenne sont identifiées comme les principaux pays avec qui leur nation devrait entretenir des partenariats dans les différents pays scrutés par l’étude. A noter qu’un partenariat avec la Russie est également particulièrement souhaité dans les pays d’Afrique sub-saharienne, sensiblement au même niveau qu’avec la France.
La prise de conscience d’un destin commun nécessitant une construction commune : pour une grande majorité de citoyens interrogés dans les six pays de cette étude, relever les grands défis mondiaux (climat, pandémies, inégalités, etc.) doit passer par la coopération internationale reposant sur l’union des forces de tous les pays. A contrario, la conception souverainiste des enjeux contemporains trouvant leur solution à partir d’un repli sur les intérêts nationaux ne fait pas recette.
Étonnamment, la France est classée en seconde position (après la Chine et avant l’UE) parmi une liste de pays susceptibles de devenir un partenaire privilégié de leur pays à la suite de la suppression de l’USAID. A contrario, parmi la même liste de pays considérés comme “alliés des pays en développement” ou en mesure “de rassembler la communauté internationale pour lutter contre la pauvreté, les pandémies et le changement climatique”, le rôle de la France souffre d’un déficit de reconnaissance. Elle est respectivement classée 6ème et 7ème sur 10, devancée par le Japon, l’Allemagne, le Royaume-Uni, la Chine et l’UE.
La préoccupation des enjeux économiques est un signifiant prioritaire pour les citoyens. En regardant les attentes vis-à-vis de leur gouvernement, on observe ainsi deux temporalités. L’une tient à l’urgence de favoriser la croissance économique dont les effets sont supposés être immédiats. L’autre tend à considérer les attentes sous l’angle de la réduction des inégalités, au sens large, c’est-à-dire incluant aussi la dimension économique, comme une priorité de moindre importance.