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Accès à la contraception dans le monde : état des lieux et défis actuels

Publié le 1er mars 2024 dans Faits et chiffres , mis à jour le 11 mars 2024

Dossier spécial sur l’état des inégalités femmes hommes-dans le monde en 2024 :

Cet état des lieux de l’accès à la contraception dans le monde est l’une des composantes d’un dossier spécial consacré aux inégalités de genre dans le monde en 2024.

 

La réalisation universelle des droits sexuels et reproductifs est l’une des cibles visées par les Objectifs de développement durable (ODD). La cible 6 de l’ODD 5 a pour ambition d’ « assurer l’accès de tous aux soins de santé sexuelle et procréative et faire en sorte que chacun puisse exercer ses droits en matière de procréation ». Cet objectif s’inscrit dans la continuité du programme d’action adopté lors de la Conférence internationale sur la population et le développement au Caire, en 1994, ainsi que du Programme d’action de Beijing, adopté en 1995, qui reconnaissent tous deux l’importance de favoriser l’accès universel aux services de santé sexuelle.

Toutefois, selon l’OMS, 164 millions de femmes en âge de procréer n’ont pas accès aux méthodes de contraception dont elles ont besoin (dernières données disponibles : 2021).

 

La contraception désigne l’ensemble des méthodes utilisées pour empêcher une grossesse non désirée. On distingue les méthodes de contraception traditionnelles comme le retrait ou le suivi du cycle menstruel de la femme, jugées peu fiables, et les méthodes modernes telles que la contraception hormonale, la contraception d’urgence, les préservatifs et les dispositifs intra-utérins.

D’une part, l’accès à la contraception garantit à chacun·e de disposer librement de son corps. D’autre part, il favorise la réduction des risques auxquels peuvent exposer une grossesse. En effet, en réduisant le recours aux avortements à risque et en prévenant les maladies maternelles, la contraception contribue directement à la diminution du taux de mortalité maternelle.

En dépit de l’importance du droit à la contraception pour la réalisation de l’ODD 3 relatif à la santé, ainsi que l’atteinte de l’ODD 5 qui vise l’égalité entre les sexes, plusieurs causes entravent encore aujourd’hui un accès libre à la contraception. La charge financière, mentale et logistique de la contraception repose essentiellement sur les femmes, accentuant davantage le poids des inégalités en matière de planification familiale. En effet, malgré l’existence de méthodes telles que la stérilisation ou la contraception hormonale masculine, le recours à la contraception demeure encore largement limité à l’utilisation féminine.

L’accès à la contraception à travers le monde : historique et chiffres-clés

 

  • 1960 : Commercialisation de la pilule contraceptive aux États-Unis, en Australie, en Allemagne et en Grande-Bretagne.
  • 1979 : Adoption de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes qui stipule que celles-ci doivent être informées des moyens de contraception et de leur utilisation et avoir un accès garanti à l’éducation sexuelle et aux services de planification familiale.
  • 1991 : Commercialisation de la pilule abortive au Royaume-Uni, en Suède (1992), puis dans 90 autres pays en 1999.
  • 1994 : Conférence internationale pour la population et le développement qui appelle les États à faire de la santé reproductive un sujet central.
  • 1995  : Déclaration et Programme d’action de Beijing, qui reconnaissent le droit de chacun·e d’être informé sur les méthodes sûres, efficaces, abordables et acceptables de planification familiale.
  • 2003 : Adoption du Protocole de Maputo par l’Union africaine reconnaissant le droit des femmes à contrôler leur fécondité et à choisir leur propre méthode de contraception.
  • 2007 : Le 26 septembre devient la Journée mondiale de la contraception.

 

  • En 2022, 874 millions de femmes dans le monde, soit 77,5 % des femmes en âge de procréer, utilisent une méthode de contraception moderne, ce qui représente une hausse de 10 points de pourcentage par rapport à 1990 (67 %)
  • Chaque année, 74 millions de femmes vivant dans des pays à revenu faible ou intermédiaire tombent enceintes de façon accidentelle

 

 

 

Un accès à la contraception moderne limité par de nombreux facteurs

 

  • L’accès limité aux services de santé sexuelle   : d’ici 2030, 70 millions de femmes supplémentaires devraient utiliser une méthode de contraception moderne. Cependant l’accès et l’utilisation de la contraception demeurent intrinsèquement liés aux inégalités socio-économiques et territoriales. En effet, le lieu de résidence et le niveau de vie du ménage favorisent ou au contraire, freinent l’utilisation de méthodes de contraception.
    • Facteurs socio-économiques   : les populations défavorisées qui vivent en périphérie et dans les bidonvilles sont généralement éloignées des services de planification familiale. Ainsi, les jeunes femmes gagnant de faibles revenus connaissent des taux disproportionnés de grossesses non désirées, notamment en raison des coûts économiques de la contraception. Dans les régions plus développées, 7 % des femmes ont des besoins non satisfaits en matière de planification familiale contre 15 % des femmes dans les pays les moins avancés. Chaque année, 74 millions de femmes vivant dans des pays à revenu faible ou intermédiaire tombent enceintes de façon accidentelle. Il en résulte 25 millions d’avortements pratiqués dans de mauvaises conditions et 39 000 décès maternels chaque année selon l’OMS. 
    • Disparités géographiques et manque de services de planification familiale : les inégalités d’accès à la contraception se superposent aux disparités géographiques. Par exemple, la proportion des besoins non satisfaits en matière de planification familiale sur le continent africain est de 25 % contre 13 % en Asie du Sud-Est, 10 % en Europe, 8 % en Amérique, et 4 % dans le Pacifique occidental.
    • Mauvaise qualité des services disponibles   : l’accès à des services de planification familiale de qualité et abordables est primordial pour la réalisation des objectifs de développement durable. Selon une étude de l’OMS aux Philippines, seules 3 % des femmes cherchant à retarder ou limiter leur grossesse ont reçu des conseils contraceptifs lors de leurs récentes visites en établissement de santé. Ceci contribue chaque année à plus de 600 000 avortements à risque aux Philippines.
    • Impact de la pandémie Covid-19 sur l’accès à la planification familiale : la pandémie de Covid-19 a causé de lourdes perturbations quant à la disponibilité et l’accès aux services de contraception, d’avortement sans risque, aux services dédiés aux personnes victimes de violences basées sur le genre ainsi qu’au dépistage du VIH et des infections sexuellement transmissibles.
  • Les obstacles à l’utilisation de la contraception : les rapports sociaux au sein des couples, les stigmatisations sociales et les croyances sont autant de facteurs qui freinent l’utilisation de la contraception. De plus, le niveau d’instruction et l’éducation à la santé sexuelle sont essentiels pour atteindre la cible 7 de l’ODD 3, c’est-à-dire «  l’accès de tous à des services de soins de santé sexuelle et procréative, y compris à des fins de planification familiale, d’information et d’éducation  ».
    • Les rapports de genre au sein d’un couple : la crainte de désaccord avec le conjoint peut amener certaines femmes à éviter les centres de planification familiale. Selon les Enquêtes démographique et de santé, dans 34 pays depuis 2015, 14 % des femmes mariées n’utilisant pas de contraception indiquent que c’est principalement leur mari qui prend cette décision.
    • La stigmatisation sociale : dans les pays où la contraception est un sujet tabou, les femmes non mariées sont moins susceptibles de rechercher une contraception par crainte d’être marginalisées. Par ailleurs, les hommes qui accompagnent leurs femmes dans les services de planning familial peuvent être perçus négativement comme étant dominés par leurs épouses et peuvent être gênés de se retrouver dans des lieux dits «  féminins  ».
    • Les motifs religieux : les croyances religieuses peuvent régir les pratiques quotidiennes des individus et influencer le recours, ou non, aux contraceptifs. Certaines religions condamnent effectivement l’utilisation de contraceptifs modernes et peuvent véhiculer l’idée selon laquelle ces méthodes seraient à l’origine de maladies et d’infidélité.
    • Le niveau d’éducation : un faible niveau d’éducation peut être un facteur favorisant les grossesses non désirées. Les données recueillies en Afrique subsaharienne confirment que le manque de connaissances ou les informations erronées constituent un obstacle à l’utilisation de la contraception selon une étude récente publiée dans The European Journal of Contraception & Reproductive Health Care.
    • La crainte des effets secondaires : Selon une étude de l’OMS dans 36 pays, 2/3 des femmes actives sexuellement qui veulent retarder ou limiter la maternité ont arrêté la contraception par crainte de problèmes de santé et en sous-estimant le risque de grossesse. Une enquête de l’Institut Guttmacher révèle enfin que dans 52 pays, un quart des femmes n’utilisent pas de contraception en raison de craintes liées aux effets secondaires, comme la stérilité ou la dépression.

 

Pour retrouver plus de données sur les inégalités femmes-hommes dans le monde, consultez notre article sur le recensement des bases de données sur les inégalités de genre dans le monde.

Découvrir le dossier spécial droits des femmes 2024 de Focus 2030 dans son intégralité.