Focus 2030
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Sondage : ce que les gouvernements devraient faire pour faire progresser l’égalité femmes-hommes dans le monde

Publié le 29 mars 2023 dans Sondages , Faits et chiffres

En partenariat avec l’University College London (UCL) et l’Université de Birmingham, Focus 2030 mène un programme de recherche-action destiné à analyser les perceptions, attitudes, comportements et ressentis des citoyen·ne·s sur les enjeux de solidarité internationale dans quatre pays : France, Allemagne, États-Unis et Royaume-Uni.

Intitulé Development Engagement Lab (DEL), ce projet vise à alimenter en données chiffrées les acteurs du développement (ONG, fondations, think tanks, ministères, institutions publiques, organisations internationales) afin de leur permettre de mieux saisir les attentes citoyennes pour mettre en œuvre leurs activités de communication, de mobilisation et de plaidoyer. Les résultats présentés ci-dessous sont issus d’un sondage administré par l’institut YouGov entre le 20 février et le 1er mars 2023 auprès d’un échantillon représentatif des populations nationales des quatre pays interrogés (France, Allemagne, Royaume-Uni, Etats-Unis), soit environ 2000 adultes par pays. Marge d’erreur retenue : ±2%.

Enquêtes après enquêtes, on remarque à quel point la nécessité d’atteindre l’égalité entre les femmes et les hommes fait aujourd’hui consensus, en France mais aussi dans les trois autres pays scrutés dans le cadre du projet de recherche-action Development Engagement Lab : Allemagne, États-Unis, Grande-Bretagne. Cette préoccupation largement documentée dans une précédente enquête fut identifiée dès 2021, lors d’un sondage mené par Focus 2030 et Women Deliver dans 17 pays à travers le monde. Ces opinions dépassent la volonté de faire advenir une égalité femmes-hommes à l’échelle nationale : d’un point de vue des citoyen·ne·s, lutter contre les inégalités de genre nécessite de s’attaquer aux problèmes dépassant les frontières. Ici, une volonté s’exprime : agir avec force afin de changer la donne et de manière tangible à l’échelle de l’Humanité toute entière.

L’égalité entre les genres constitue aux yeux des Français·es, un enjeu qui nécessite une plus grande coopération internationale aux côtés d’autres sujets plus traditionnels tels que l’éradication de la faim, l’accès à l’éducation, ou la santé. C’est dans ce cadre que les citoyen·ne·s de France, d’Allemagne, de Grande-Bretagne et des États-Unis ont été interrogées sur leurs attentes vis-à-vis de leur gouvernement respectif en matière d’égalité dans le cadre des politiques de développement international. L’occasion de mesurer le soutien des populations en faveur d’une politique de développement (ou d’une diplomatie) féministe, revendiquée par un nombre grandissant de pays.

 

Soutenir les femmes et les filles en Iran, en Afghanistan et en Ukraine

 
  • Lorsqu’on interroge les Français·es pour savoir dans quelle mesure il importe de venir en aide aux femmes et aux filles à la fois en Iran, en Afghanistan ou en Ukraine, une majorité des personnes sondées indiquent attendre du gouvernement français qu’il soutienne ces femmes et ces filles, peu importe le pays concerné.
  • A y regarder de plus près, on observe que les femmes et les hommes soulignent cette « importance » dans les mêmes proportions.
  • En revanche, le niveau d’éducation fait varier la sensibilité relative à cette question : on observe un écart d’environ 15 points entre les répondant·e·s qui déclarent ne pas avoir le Bac (moins nombreux à penser qu’il est important que le gouvernement vienne en aide aux femmes dans ces trois pays) et celles et ceux qui déclarent avoir au moins un Bac +2.

Les gouvernements doivent faire plus d’efforts pour faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes au sein même de leur pays que dans le reste du monde

 
  • Quand on interroge les Français·es, les Allemand·e·s, les Britanniques et les Américain·e·s sur le rôle de leur gouvernement respectif pour faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes, tant à l’échelle nationale dans ces mêmes quatre pays que dans le reste du monde, une majorité des personnes interrogées déclare que leur gouvernement devrait faire (un peu ou beaucoup) plus d’efforts.
  • Parmi les quatre pays interrogés, c’est en France que cette opinion est la plus partagée (53%), soit 12 points de pourcentage de plus que les opinions recueillies en Allemagne, en Grande-Bretagne et aux États-Unis.
  • En France et en Allemagne, seule une minorité (10%) de répondant·es considère que leur gouvernement devrait faire moins d’efforts. Cette proportion s’élève toutefois à 18% en Grande-Bretagne et à 27% aux États-Unis.
  • Le constat de satisfaction consistant à considérer que « le gouvernement fait ce qu’il faut » est partagé de façon similaire dans les quatre pays interrogés.
  • Sans grande surprise, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à déclarer que leur gouvernement devrait faire plus d’efforts, soit un écart de 13 points en France, 11 points en Allemagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis.

La politique étrangère et l’aide publique au développement doivent servir à protéger l’accès à l’avortement dans les pays en développement

Même si, en 2023, le droit à un avortement libre et sûr est de plus en plus reconnu dans le monde, sa légalisation demeure un objet clivant, sujet à débats politiques, sociétaux et législatifs, notamment dans certains pays à revenus élevés. C’est le cas aux États-Unis, un des quatre pays couverts par cette étude, où la révocation du droit à l’avortement par la Cour suprême le 24 juin 2022 continue d’interroger. Dans ce contexte, il est apparu nécessaire d’évaluer les attentes des individus sur la promotion de l’accès à l’avortement de la part de leur gouvernement respectif, à l’échelle du monde et notamment dans les pays en développement.

 
  • La distribution des réponses à cette question montre que pour la majorité des personnes interrogées, il est important (très ou plutôt) que les politiques étrangères ou l’aide publique au développement des quatre pays interrogés (France, Allemagne, Royaume-Uni et États-Unis) contribue à protéger l’accès à l’avortement dans les pays en développement.
  • Plus en détail, c’est en France que le soutien à l’accès à l’avortement dans les pays en développement semble être la plus importante, une opinion en l’occurrence très largement partagée par 74% des répondant·e·s (hommes et femmes confondus), soit 23 points de pourcentage de plus qu’aux États-Unis, 14 points de plus qu’en Grande-Bretagne et 9 points de plus qu’en Allemagne.
  • Notons cependant que malgré les débats politiques et législatifs qui font rage aux États-Unis sur cette question, seuls 21% des Américain·e·s interrogés ne considèrent pas important que leur pays soutienne le droit à l’avortement dans les pays en développement.
  • Dans les quatre pays interrogés, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à considérer cette dimension comme importante. De façon symétrique, on observe la même différence entre les opinions des femmes et des hommes parmi les personnes interrogées qui considèrent que soutenir l’accès à l’avortement dans les pays en développement n’est pas important (plutôt pas ou pas du tout).

Les enjeux sur lesquels les gouvernements devraient s’impliquer pour mieux protéger les femmes et les filles

Dans le monde, les femmes et les filles sont victimes de violences et de discriminations qu’il est urgent d’éliminer pour faire progresser le respect de leurs droits, notamment à travers des politiques et des programmes prenant en compte le genre. Les résultats ci-dessous témoignent des attentes des citoyen·nes vis-à-vis de leur gouvernement respectif (en France, en Allemagne, en Grande-Bretagne et aux États-Unis) à propos d’une série de problématiques qui affectent les femmes et les filles dans le monde.

 
  • Dans l’ensemble, les six enjeux listés dans cette question recueillent un intérêt de niveau comparable dans les quatre pays interrogés. Cependant, dans les réponses obtenues aux États-Unis, la protection du droit à l’avortement suscite moins d’attente, même si 63% des Américain·e·s interrogés souhaitent voir l’implication de leur gouvernement sur ce sujet.
  • La majorité des personnes interrogées dans les quatre pays étudiés souhaite que leur gouvernement s’implique sur cinq de ces six enjeux de façon relativement uniforme, comme si ces cinq enjeux revêtaient la même importance. La « précarité menstruelle » recueille néanmoins moins d’attentes de la part des citoyen·ne·s, dans la mesure où cet enjeu, (ou la formulation utilisée dans la question pour l’exprimer) est également moins connu d’une partie des répondant·e·s (notamment en Allemagne).
  • Quand on observe les données recueillies en France, le fait que le gouvernement s’implique contre « le harcèlement sexuel » apparaît comme une préoccupation majeure pour l’ensemble des répondant·e·s. Dans des proportions similaires, vient ensuite, le souhait que le gouvernement français s’implique contre « les violences dans les conflits », pour « le droit à l’avortement », contre « les mutilations génitales féminines », et contre « le mariage des enfants ». En France également, la « précarité menstruelle » génère un intérêt inférieur (15% des répondant·e·s « ne savent pas »).
  • Pour l’ensemble de ces six enjeux, les femmes sont toujours plus nombreuses que les hommes à déclarer qu’il est important que le gouvernement français s’implique en faveur des femmes et des filles. Les écarts de pourcentage entre les femmes et les hommes oscillent entre 16 points (précarité menstruelle) et 9 points (harcèlement sexuel).

Soutien de principe à une politique de développement « féministe »

 
  • En interrogeant les Françaises et les Français sur le principe d’une « politique féministe d’aide internationale en faveur des pays en développement », 41% déclarent qu’ils soutiendraient cette politique et 40% se déclarent plutôt indifférents : ni soutien ni opposition. En réalité, seul·e·s 4% des Français·es interrogés s’opposeraient à une telle politique menée par leur gouvernement, c’est-à-dire qu’on observe ici la confirmation qu’il n’existe aucune opposition identifiée en France au fait de mener une politique de développement « féministe », soit aucun risque politique.
  • La proportion des personnes qui s’oppose à une politique de développement féministe est plus importante en Allemagne et aux États-Unis (+12 points) et dans une moindre mesure en Grande-Bretagne (+8 points).
  • Sur cette question, le soutien des hommes est identique au soutien recueilli auprès des femmes. En revanche, ce soutien a tendance à diminuer à mesure que les répondant·e·s sont âgés. On note aussi un soutien beaucoup plus élevé chez les jeunes de 18 à 34 ans (+21 points) et chez les répondant·e·s déclarant un niveau d’études supérieur au Bac.

Comment nommer une politique de développement qui s’intéresse à l’égalité entre les femmes et les hommes ?

Il y a plusieurs manières de nommer une politique de développement qui prenne en compte les enjeux auxquels sont confrontées femmes et les filles dans le monde. Quatre manières de formuler cette politique ont donc été testées pour mesurer l’expression la plus susceptible de générer de l’intérêt de la part des Français·es.

 
  • Il s’avère que l’expression relativement explicative (« Une politique intégrant les enjeux d’égalité femmes-hommes ») recueille plus de soutien, soit +10 points par rapport à l’expression contenant « une politique inclusive » et +8 points par rapport à l’expression ne mentionnant pas du tout les enjeux d’égalité femmes-hommes.
  • On identifie donc un intérêt à préciser que la politique de développement entend intégrer les enjeux d’égalité femmes-hommes. En revanche, l’expression contenant le mot inclusive, semble moins facile d’accès (« une politique inclusive d’aide internationale ») et recueille à la fois le moins de soutien et le plus fort taux de « je ne sais pas ».
  • L’expression plus connotée féminisme (« Une politique féministe d’aide internationale ») a été sélectionnée dans des proportions similaires, mais elle recueille un soutien divergent entre les femmes interrogées (61%) et les hommes (51%), soit un écart de 10 points entre les deux genres.

Quelles doivent être les priorités d’une diplomatie féministe ?

 
  • Parmi une liste de plusieurs priorités que le gouvernement devrait prendre en compte dans le cadre d’une diplomatie féministe, les personnes interrogées en France ont d’abord sélectionné une approche par les droits, puis par l’autonomisation économique des femmes (travail décent, formation professionnelle, etc.) et enfin par l’éducation des filles. Plus en détail, on remarque que les femmes sont plus nombreuses que les hommes (9 points d’écart) à avoir sélectionné la protection des droits des femmes et des filles.
  • Financer des politiques publiques dans les pays en développement ou promouvoir la représentation des femmes dans les mécanismes de prise de décision sont deux priorités nettement moins plébiscitées par les personnes interrogées en France.
  • L’âge des personnes interrogées en France n’est pas déterminant sur ces réponses, sinon à propos du financement de politiques publiques, un objectif davantage sélectionné par les répondant·e·s de 18 à 34 ans que par leurs aînés (10 points d’écart).
  • En comparant avec les trois autres pays de cette enquête, il s’avère que les personnes interrogées en Allemagne, en Grande-Bretagne et aux États-Unis ont finalement donné des réponses plutôt similaires à celles obtenues en France, parfois dans un ordre différent, mais toujours en identifiant les trois mêmes priorités que devrait recouvrir une politique de développement féministe, à savoir l’éducation, les droits et l’autonomie économique.

 

Ces données sont issues de notre sondage réalisé par l’Institut YouGov et piloté par l’équipe de recherche du University College London et de l’Université de Birmingham dans le cadre du projet Development Engagement Lab. Information et méthodologie disponible ici.

En savoir plus :

Découvrez dans cet article les opinions et connaissances des Français·es, Américain·e·s, Allemand·e·s et Britanniques sur l’égalité femmes-hommes dans le monde : a-t-elle progressé depuis dix ans ? Quels sont les obstacles ? Les discriminations subies par les femmes sont-elles sous-estimées ou sur-estimées ? etc. 

Ainsi qu’un article sur les actions privilégiées par les citoyen·ne·s de ces quatre pays pour inciter le gouvernement à faire progresser l’égalité de genre dans le monde (signer une pétition, voter, manifester, etc).


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