Publié le 8 novembre 2023 dans Décryptages , mis à jour le 23 avril 2024
Les 22 et 23 juin 2023, s’est tenu à Paris le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial. Depuis, les dirigeant·e·s d’États, les gouvernements, les organisations internationales, la société civile et le secteur privé ont été invités à discuter et mettre en oeuvre des solutions pouvant répondre aux crises du climat et de la pauvreté, étroitement liées. Réforme de l’architecture financière internationale, financements innovants, annulation et rééchelonnement de dettes sont autant de sujets discutés pour adapter le financement du développement aux besoins des pays les plus vulnérables. Découvrez notre dossier spécial consacré aux enjeux de la refonte de l’architecture financière internationale, qui dresse un bilan des progrès et obstacles observés depuis la tenue du Sommet pour un Nouveau pacte financier mondial. |
Les 22 et 23 juin 2023, s’est tenu à Paris le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, une rencontre internationale ayant pour objectif d’apporter sa pierre à l’édifice d’une réforme de l’architecture financière internationale urgente et nécessaire.
Alors que le monde fait face à une polycrise sanitaire, humanitaire, économique et géopolitique sans précédent, les financements pour assurer les besoins essentiels des populations, en particulier les plus vulnérables, viennent à manquer. Le déficit de financement pour atteindre les Objectifs de développement durable (ODD) d’ici à 2030, évalué par l’OCDE à 3 900 milliards de dollars pour les seuls pays en développement, semble colossal en comparaison des moyens effectivement mobilisés pour le développement chaque année (204 milliards de dollars mobilisés par l’aide publique au développement en 2022). Par conséquent et dans un contexte d’endettement croissant, les politiques publiques essentielles d’un grand nombre de pays en développement ne peuvent être assurées. La santé, l’éducation, l’égalité femmes-hommes passent au second plan alors qu’ils sont au cœur de l’atteinte de l’Agenda 2030. Parallèlement, la lutte contre les changements climatiques, qui affectent d’ores et déjà les pays les plus vulnérables de façon disproportionnée, ne peut être financée à hauteur des besoins.
Le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial a ainsi permis de formuler un certain nombre d’engagements par les différentes parties prenantes (États, institutions financières internationales et nationales, secteur privé), afin d’accélérer les efforts pour mobiliser davantage de financements pour le développement et pour le climat au moment où les pays en développement font face à une contraction inédite de leur espace fiscal. Ces engagements sont mentionnés dans le Pacte de Paris pour les peuples et la planète (4P) et la feuille de route issue du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial.
À l’occasion du Forum de Paris sur la Paix en novembre 2023, la création d’un secrétariat et d’un comité de mise en oeuvre des 4P au sein de l’OCDE a été annoncée, avec à sa tête l’ancien Président du Sénégal Macky Sall. En avril 2024, 51 pays ont signé les 4P.
Afin d’effectuer le suivi de cette rencontre et d’obtenir un aperçu le plus précis possible des efforts qu’il reste à accomplir, Focus 2030 réalise une revue indépendante de l’avancée de 36 engagements formulés en juin 2023. Résumé des enseignements.
Les 36 engagements identifiés dans la feuille de route du Sommet et dans les 4P ont été évalués selon leur niveau d’avancement (avancée notable, avancée encourageante mais insuffisante, avancée mineure, pas d’avancée voire régression) et désagrégés en cinq domaines d’action :
Le tableau ci-dessous résume, pour l’ensemble de ces engagements, les évolutions observées depuis juin 2023.
Tableau mis à jour le 15 avril 2024
Si la réforme de l’architecture financière internationale demeure en haut de l’agenda international depuis plus d’un an, en dépit des multiples crises en cours, notamment grâce à l’impulsion du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, les progrès observés demeurent trop lents pour tenir la promesse de l’Agenda 2030 et de l’Accord de Paris.
Parmi les avancées notables, on remarque notamment une volonté affirmée de la part des banques multilatérales de développement et des institutions financières internationales de réformer leurs manières d’opérer et leurs outils, et une dynamique positive relative aux enjeux de gouvernance et de représentativité des pays en développement dans ces organisations.
Néanmoins, de nombreux défis subsistent. Si les chefs d’Etats semblent s’accorder sur la nécessité d’agir de manière efficace et rapide, les décisions ne suivent pas : sur le traitement de la dette, la mise en œuvre de taxes internationales, la mobilisation du secteur privé ou la mise à disposition de davantage de ressources, les progrès n’avancent pas au rythme nécessaire pour faire face à la contraction inédite de l’espace fiscal des pays les plus vulnérables.
Plusieurs signaux inquiètent particulièrement face à l’urgence de la situation : une recapitalisation de la Banque mondiale ne semble quasiment pas envisagée par nombre de responsables politiques, l’aide publique au développement stagne voire diminue dans plusieurs pays, et une volonté politique forte manque à l’appel pour mobiliser davantage de financements via la fiscalité internationale et l’instauration de taxes mondiales. Les espoirs semblent dirigés vers les acteurs privés, qui ne peuvent néanmoins réaliser à eux-seuls l’ensemble des efforts et dont les secteurs et pays d’investissements peuvent difficilement être orientés vers les politiques sociales “non bancables” comme l’éducation ou la santé. Il importe donc de ne pas substituer une allocation suffisante de ressources concessionnelles aux pays en développement à des subventions au secteur privé, dont l’efficacité n’est pas garantie.
Ainsi, pour tenir la promesse de l’Agenda 2030 et de l’Accord de Paris, il est vital de redoubler d’efforts et de répondre aux espoirs des pays les plus vulnérables, notamment lors des futures échéances internationales, notamment la COP28 qui se tiendra à Dubaï du 30 novembre au 12 décembre 2023 et la présidence du G20 par le Brésil durant l’année 2024, dont le mot d’ordre est précisément de « construire un monde juste sur une planète durable ».