Publié le 8 novembre 2023 dans Décryptages , mis à jour le 20 décembre 2024
Les 22 et 23 juin 2023, s’est tenu à Paris le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, une rencontre internationale ayant pour objectif d’apporter sa pierre à l’édifice d’une réforme de l’architecture financière internationale urgente et nécessaire.
Alors que le monde fait face à une polycrise sanitaire, humanitaire, économique et géopolitique sans précédent, les financements pour assurer les besoins essentiels des populations, en particulier les plus vulnérables, viennent à manquer. Le déficit de financement pour atteindre les Objectifs de développement durable (ODD) d’ici à 2030, évalué par les Nations unies à 4000 milliards de dollars par an pour les seuls pays en développement, semble colossal en comparaison des moyens effectivement mobilisés pour le développement chaque année (223,7 milliards de dollars mobilisés par l’aide publique au développement en 2023). Par conséquent et dans un contexte d’endettement croissant, les politiques publiques essentielles d’un grand nombre de pays en développement ne peuvent être assurées. La santé, l’éducation, l’égalité femmes-hommes passent au second plan alors qu’ils sont au cœur de l’atteinte de l’Agenda 2030. Parallèlement, la lutte contre les changements climatiques, qui affectent d’ores et déjà les pays et les populations les plus vulnérables de façon disproportionnée, ne peut être financée à hauteur des besoins.
Le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial a ainsi permis de formuler un certain nombre d’engagements par les différentes parties prenantes (États, institutions financières internationales et nationales, secteur privé), afin d’accélérer les efforts pour mobiliser davantage de financements pour le développement et pour le climat au moment où les pays en développement font face à une contraction inédite de leur espace fiscal. Ces engagements sont mentionnés dans le Pacte de Paris pour les peuples et la planète (4P) et la feuille de route issue du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial.
Depuis novembre 2023, un secrétariat, hébergé à l’OCDE, et un comité de suivi sont chargés de maintenir l’agenda du 4P en haut de la liste des priorités de la communauté internationale. Leurs travaux sont appuyés par un envoyé spécial, l’ancien Président du Sénégal Macky Sall. En décembre 2024, 67 pays ont signé le 4P.
Afin d’effectuer le suivi des engagements compris dans le 4P et d’obtenir un aperçu le plus précis possible des efforts qu’il reste à accomplir, Focus 2030 réalise une revue indépendante de l’avancée de 40 engagements formulés en juin 2023. Résumé des enseignements.
Les 40 engagements identifiés dans la feuille de route du Sommet et dans les 4P ont été évalués selon leur niveau d’avancement (avancée notable, avancée encourageante mais insuffisante, avancée mineure, pas d’avancée voire régression) et désagrégés en cinq domaines d’action :
Le tableau ci-dessous résume, pour l’ensemble de ces engagements, les évolutions observées depuis juin 2023.
Tableau mis à jour le 18 décembre 2024
Si la réforme de l’architecture financière internationale demeure en haut de l’agenda international depuis plus de deux ans en dépit des multiples crises en cours, notamment grâce à l’impulsion du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, les progrès observés demeurent trop lents pour tenir la promesse de l’Agenda 2030 et de l’Accord de Paris.
Parmi les avancées notables, on remarque notamment une volonté affirmée de la part des banques multilatérales de développement et des institutions financières internationales de réformer leurs manières d’opérer et leurs outils, et des dynamiques positives relatives à l’exploration de pistes pour une plus grande justice fiscale internationale et aux enjeux de gouvernance et de représentativité des pays en développement dans les institutions structurant l’architecture financière internationale.
Néanmoins, de nombreux défis subsistent. Si les chefs d’Etats semblent s’accorder sur la nécessité d’agir de manière efficace et rapide, les décisions ne suivent pas : sur le traitement de la dette, la mobilisation du secteur privé ou la mise à disposition de davantage de ressources, les progrès n’avancent pas au rythme nécessaire pour faire face à la contraction inédite de l’espace fiscal des pays les plus vulnérables.
Plusieurs signaux inquiètent particulièrement face à l’urgence de la situation : une recapitalisation de la Banque mondiale ne semble quasiment pas envisagée par nombre de responsables politiques et plusieurs organisations de la société civile craignent un « enlisement » des réformes de la Banque, l’aide publique au développement stagne voire diminue dans plusieurs pays donateurs majeurs – dont la France qui fait pourtant partie des pays à l’origine du 4P, et une volonté politique forte manque à l’appel pour mobiliser davantage de financements et tenir les engagements passés.
Les espoirs semblent dirigés vers les acteurs privés, qui ne peuvent néanmoins réaliser à eux-seuls l’ensemble des efforts et dont les secteurs et pays d’investissements peuvent difficilement être orientés vers les politiques sociales non lucratives comme l’éducation ou la santé. Il importe donc de ne pas substituer une allocation suffisante de ressources concessionnelles aux pays en développement à des subventions au secteur privé, dont l’efficacité n’est pas garantie.
Ainsi, pour tenir la promesse de l’Agenda 2030 et de l’Accord de Paris, il est vital de redoubler d’efforts et de répondre aux espoirs des pays les plus vulnérables, notamment lors des futures échéances internationales, notamment lors des futures échéances internationales. L’année 2025 sera à ce titre particulièrement symbolique, avec la tenue de la 4ème Conférence internationale sur le financement du développement (FfD4) du 30 juin au 3 juillet 2025 en Espagne et les deux ans du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial. En outre, à l’occasion du Jubilé 2025, de nombreuses voix issues des organisations de la société civile en appellent à l’annulation des dettes des pays les plus pauvres, une décision qui pourrait permettre de dégager l’espace fiscal nécessaire pour faire face simultanément à la pauvreté et aux changements climatiques.