Publié le 12 avril 2023 dans Décryptages
« Le monde ne dispose plus de beaucoup de temps pour sauver les Objectifs de développement durable (ODD) ». C’est ainsi qu’Antonio Guterres, Secrétaire général des Nations unies, introduit le nouveau rapport du groupe de travail inter-agences des Nations unies pour le financement du développement, Financer les transformations durables. Ce rapport, publié le 5 avril 2023, identifie les solutions à mettre en œuvre pour financer l’atteinte des ODD d’ici 2030 et répondre aux enjeux climatiques dans un contexte international troublé.
Depuis 2020, les crises politiques, sanitaires, énergétiques et économiques (Covid-19, guerre en Ukraine) ont eu des conséquences dramatiques sur les pays les plus vulnérables et ont occasionné de sérieux revers sur l’ensemble des Objectifs de développement durable. La faim, la pauvreté et les inégalités se sont aggravées alors qu’une crise de la dette menace d’ores et déjà cinquante-quatre pays en développement selon les Nations unies. Pour la première fois en 30 ans, l’extrême pauvreté a augmenté : elle est passée de 8 % de la population mondiale en 2019 à 9 % en 2020. Le nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire a également plus que doublé, de 135 millions en 2019 à 245 millions en 2023. Face à ces constats et pour éviter un développement durable à deux vitesses, qui laisserait de côté les pays les plus affectés par les conséquences de ces crises, les Nations unies appellent dans ce rapport à un soutien de la communauté internationale et à des transformations structurelles des architectures financières à la fois internationales et nationales. Résumé.
Prendre des mesures immédiates pour soulager les pays vulnérables
Si les auteurs du rapport Financer les transformations durables précisent que les pays sont responsables de leurs propres politiques de développement, ils rappellent néanmoins que la communauté internationale se doit d’agir pour soutenir et créer les conditions d’un environnement propice à leur réalisation. Dans le contexte actuel, force est de constater que la communauté internationale n’est pas où on l’attend, tout particulièrement auprès des pays « vulnérables », c’est-à-dire les pays les plus susceptibles d’être affectés par des chocs exogènes constituant un obstacle majeur à leur développement (désastres naturels, conflits, conséquences des changements climatiques). Entre 2015 et 2022, la proportion de pays à faible revenu à haut risque ou en situation de surendettement a plus que doublé (de 27 % à 60 %), ce qui représente un frein supplémentaire à leur développement et témoigne d’une incapacité des pays industrialisés à proposer des solutions efficaces pour les soutenir.
Compte-tenu de ces contraintes, il leur est impossible de disposer de ressources domestiques supplémentaires pour financer une transition durable : une coopération internationale accrue et des financements plus importants s’avèrent en conséquence indispensables.
Dans cette optique, le rapport recommande plusieurs mesures :
Renforcer l’architecture financière internationale
L’architecture financière internationale est le cadre institutionnel qui régit les échanges financiers internationaux. Le Groupe de la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) en sont des acteurs majeurs : ces deux institutions créées en 1944 ont respectivement pour missions de garantir le développement durable et la stabilité financière internationale. Néanmoins, leur capacité à répondre aux enjeux climatiques et de développement est remise en cause. Un exemple parlant est celui de l’allocation des droits de tirages spéciaux (DTS) du FMI : sur les 650 milliards de dollars en DTS alloués en 2022, seuls 17 milliards (soit 2,5 %) sont allés vers les pays les moins avancés, qui ont pourtant l’espace budgétaire le plus contraint pour faire face aux défis actuels. Face à ce constat, la nécessité de réformer ces institutions fait aujourd’hui consensus. Le rapport propose ainsi un certain nombre de mesures pour mener à bien une telle réforme :
Accélérer les actions durables de transformation de l’industrie au niveau national
Si des réformes internationales s’imposent, un certain nombre de transformations au niveau national sont également envisagées par les Nations unies, parmi lesquelles :
Ce rapport est rendu public en amont des assemblées de printemps de la Banque mondiale et du FMI et à deux mois du sommet « pour un nouveau pacte financier mondial », qui se tiendra à Paris en juin 2023, dont l’objectif est de trouver de nouvelles solutions de financements pour lutter contre les inégalités mondiales et la crise climatique.
Pour en apprendre davantage sur les enjeux de ce sommet, veuillez consulter ce décryptage sur le sujet.