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Les positions des candidat·e·s à l’élection présidentielle 2022 sur les enjeux d’aide au développement, de santé mondiale et de diplomatie féministe

Publié le 10 mars 2022 dans Décryptages

Analyse des réponses au questionnaire adressé aux canidat·e·s

En amont du Forum France International qui s’est tenu le 27 février 2022, les think tanks Open Diplomacy, la Fondation Jean-Jaurès et l’Institut Montaigne ont adressé un questionnaire aux candidat·e·s à l’élection présidentielle sur ce que serait leur politique étrangère en cas d’élection à la fonction suprême. À la lecture des questionnaires des candidat·e·s ayant joué le jeu des questions-réponses, Focus 2030 a tiré un premier bilan de leur positionnement sur les enjeux d’aide au développement, de diplomatie féministe et de santé mondiale, autant de sujets au cœur des Objectifs de développement durable. Décryptage.

Forum France International

Dans une campagne marquée par les coups d’éclats, la polarisation à l’extrême et la nécessité pour les candidats et les candidates de se démarquer de la concurrence, le rôle que la France devrait jouer dans le monde en faveur des pays les plus fragiles semble être le sujet qui les rassemble.

Toutes et tous semblent s’accorder sur le principe que la France a un rôle à jouer et aucun candidat en lice ne prône de positionnement ouvertement isolationniste. À noter que cette analyse ne porte que sur les questionnaires reçus et ne prend pas en compte les multiples prises de positions des candidat·e·s dans leurs interventions publiques présentes ou passées, parfois contradictoires.


Une France plus solidaire : 0,7 % de la richesse nationale allouée à l’aide publique au développement (APD), un consensus politique

De gauche à droite de l’échiquier politique, on observe un consensus en faveur de l’aide au développement parmi les candidat·e·s à l’élection présidentielle. Tous semblent s’accorder en faveur d’une augmentation d’un soutien financier à destination des plus pauvres et de l’atteinte de l’objectif d’allouer 0,7 % (1 % pour Y. Jadot d’ici 2030) de la richesse nationale à l’aide au développement, à l’exception des candidats d’extrême droite, qui ne se prononcent pas sur le sujet. L’atteinte de cet objectif, inscrit dans la loi sur le développement solidaire et la lutte contre les inégalités mondiales (adoptée à l’unanimité en août 2021), est prévue dès 2025, une révolution puisque cette promesse n’avait jamais été respectée par la France depuis 1970, date de la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies adoptée en ce sens.

Ce consensus fait écho au soutien des Français·es en faveur d’une plus grande solidarité de la France vis-à-vis des pays pauvres que l’on observe de manière régulière dans nos enquêtes par sondage.


- Des arguments récurrents en faveur d’une meilleure qualité de l’aide au développement : pays pauvres, droits humains et tropisme pour le continent africain

Le principe du soutien et du partenariat avec les pays les plus fragiles n’est remis en cause par aucun·e candidat·e à la lecture des questionnaires reçus. Le caractère désintéressé de l’aide française (soutien aux populations et pays les plus fragiles, défense des droits humains, exigence morale) est mis en avant parmi les candidat·e·s de gauche mais également de droite (V. Pécresse), avec un soutien privilégié au continent africain et sous la forme de dons (plutôt que de prêts).

À la lecture des questionnaire reçus, seule l’extrême droite (E. Zemmour) entend conditionner l’aide aux pays selon la manière dont ces derniers accueillent ou non leurs ressortissants en situation irrégulière en France, sans toutefois remettre en question le principe de l’APD.


La France et la diplomatie féministe : une direction assumée

Tou·te·s les candidat·e·s ayant répondu aux questions soulevées sur ce sujet (J.-L. Mélenchon, Y. Jadot, A. Hidalgo, F. Roussel, V. Pécresse) assurent qu’une fois « Président·e », la France poursuivra une diplomatie féministe au service des droits des femmes et des filles dans le monde, et qui bénéficiera de moyens accrus, à l’exception notable de E. Zemmour pour qui « le rôle de la diplomatie n’est pas de promouvoir des idéologies. »


Liberté, égalité, fraternité, santé : le rôle de la France en matière de santé mondiale

 Droits et santé sexuels et reproductifs : la France se doit d’être au rendez-vous de la santé des femmes dans le monde

On observe un soutien consensuel à l’action de la France en faveur du respect des droits et de la santé sexuels et reproductifs (DSSR) des femmes dans le monde (V. Pécresse, A. Hidalgo, Y. Jadot, J.-L Mélenchon, F. Roussel). Si le candidat E. Zemmour considère la santé des femmes comme un enjeu qui a sa place dans la politique étrangère et d’aide au développement de la France, il affirme que « la fonction de notre diplomatie n’est pas de promouvoir le féminisme déconstructeur ».


 Un soutien appuyé au financement de la santé mondiale par la France

Le soutien financier en faveur de la santé mondiale et aux grands fonds verticaux qui permettent de lutter contre les grandes pandémies (à l’instar du Fonds mondial contre le sida, la tuberculose et le paludisme) ou d’acheter des vaccins en masse (Gavi, l’Alliance du vaccin) n’est pas remis en cause (V. Pécresse, A. Hidalgo, Y. Jadot, F. Roussel, E. Zemmour) même si la gouvernance de la santé mondiale mériterait d’être moins complexe (V. Pécresse) ou l’efficacité des grands fonds analysée avec attention (E. Zemmour). J.-L. Mélenchon suggère en outre « une contribution progressive des États en fonction de leur niveau de richesse ».


 Vaccins : une solidarité vaccinale consensuelle

La logique des dons de doses de vaccins est insuffisante pour certain·e·s, pour qui il importe de soutenir la production de vaccins, traitements et tests dans les pays en développement eux-mêmes (V. Pécresse, A. Hidalgo, Y. Jadot, J.-L. Mélenchon). La solidarité vaccinale de la France vis-à-vis des pays les plus pauvres n’est remise en cause par aucun·e candidat·e (V. Pécresse, A. Hidalgo, Y. Jadot, F. Roussel, E. Zemmour), même si pour J.-L. Mélenchon, il s’agit d’une stratégie « peu efficace ».


 Levée des brevets : le dissensus gauche-droite ?

Une fracture semble s’opérer entre candidat·e·s quant à la régulation ou non des marchés en temps de pandémie, les candidat·e·s de gauche (A. Hidalgo, Y. Jadot, J.-L. Mélenchon, F. Roussel) s’inscrivant pleinement en faveur de la levée temporaire des brevets sur les vaccins à l’OMC, demandée par les pays en développement et de nombreuses ONG, un sujet qui n’est pas relevé par les candidat·e·s classés à droite (V. Pécresse) ou à l’extrême droite (E. Zemmour).


 Coopérer pour renforcer durablement les systèmes de santé

Toutes les réponses au questionnaire relèvent la nécessité d’un renforcement des systèmes de santé dans les pays les plus fragiles. La consolidation du rôle de l’OMS (A. Hidalgo, F. Roussel) ou des initiatives multilatérales en général (E. Zemmour) apparaît comme une nécessité, voire l’élargissement des compétences de l’UNOSAT à la santé (J.-L. Mélenchon). Les candidat·e·s soulèvent également l’importance de la coopération bilatérale, que ce soit via le partage des connaissances techniques et technologiques (F. Roussel, V. Pécresse, E. Zemmour), la hausse de l’APD de la France allouée à la santé mondiale (Y. Jadot) ou sa concentration sur l’hygiène et l’accès à l’eau potable (J.-L. Mélenchon). Pour V. Pécresse, les partenariats publics-privés constituent également une solution.


  One health : ne pas oublier que tout est lié

Le concept «   Une seule santé  » ou " One health approach" selon sa dénomination anglosaxone entend considérer la santé des animaux, la santé des humains et la santé des écosystèmes comme interconnectées et interdépendantes. A la lecture des réponses des candidat·e·s, il apparaît que le lien entre santé humaine, santé animale et santé des écosystèmes est évident pour tou·te·s les candidat·e·s ayant répondu à cette question (F. Roussel, J.-L. Mélenchon, Y. Jadot, A. Hidalgo, V. Pécresse), à l’exception d’E. Zemmour, pour qui il est « possible mais pas nécessairement mécanique ».


Conclusion

Si les enjeux internationaux ont été longtemps à la périphérie de cette campagne présidentielle 2022, l’invasion soudaine de l’Ukraine par la Russie a suscité un engouement inattendu des observateurs de la vie publique quant au positionnement des candidat·e·s sur les enjeux géopolitiques, et par extension sur leurs programmes en matière de solidarité internationale, de santé mondiale, de diplomatie féministe et de réponse au défi climatique. Le débat public initié par Open Diplomacy, la Fondation Jean Jaurès et l’Institut Montaigne dans le cadre de cet événement soutenu par le Journal du Dimanche et Focus 2030 n’est que le début d’un effort collectif pour mobiliser relais d’opinion, citoyennes et citoyens sur la nécessité d’un débat éclairé sur les enjeux de développement durable. Affaire à suivre.


Visionnez le débat du 27 février 2022 animé par François Clemenceau, Rédacteur en chef international du JDD, en présence des porte-paroles des principaux candidats à l’élection présidentielle :

  • Hubert Julien-Laferrière, Député, Porte-parole de Yannick Jadot
  • Hervé Juvin, Député européen, Porte-parole de Marine Le Pen
  • Bastien Lachaud, Député, Porte-parole de Jean-Luc Mélenchon
  • Jérôme Rivière, Député européen, Vice-président de Reconquête
  • Rachid Temal, Sénateur et Porte-parole de Anne Hidalgo
  • Jean-Louis Thiériot, Député et représentant de Valérie Pécresse

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