Publié le 23 juin 2021 dans Décryptages , mis à jour le 8 avril 2024
Du 30 juin au 2 juillet 2021, la France accueillait la conclusion du Forum Génération Égalité, conférence mondiale qui devait constituer un évènement historique pour les droits des femmes. L’objectif du Forum était de permettre aux gouvernements, à la société civile et au secteur privé, de prendre des engagements concrets, jusqu’en 2026, en faveur de l’égalité des genres partout dans le monde.
Depuis 2018, l’égalité entre les femmes et les hommes est un enjeu prioritaire de la politique étrangère de la France, et à ce titre, elle a d’ores et déjà pris des engagements législatifs. Concrétiser ces engagements signifierait allouer, entre 2022 et 2026, 12 milliards d’euros de son aide publique au développement à la promotion directe de la parité. Décryptage.
En 2018, le Comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID), qui définit les modalités de la politique française d’aide au développement, a adopté une stratégie pour une diplomatie féministe, selon laquelle « l’égalité entre les femmes et les hommes est un principe directeur et transversal de l’action extérieure de la France ».
Les engagements financiers des gouvernements en faveur de l’égalité des genres sont mesurés à travers le « marqueur genre » du Comité d’aide au développement de l’OCDE. Ce marqueur permet de connaître la proportion des engagements d’aide publique au développement bilatérale des bailleurs de fonds ayant pour objectif principal (marqueur 2) ou significatif (marqueur 1) l’égalité des genres.
La France s’est ainsi engagée à ce que d’ici 2022, 100 % des projets et programmes de l’Agence française de développement (AFD) soient marqués selon le marqueur « genre » de l’OCDE, et que 50 % des volumes annuels d’engagements de l’Agence française de développement aient l’égalité des genres pour objectif principal ou significatif.
De plus, à l’été 2021, la France a adopté un nouveau cadre législatif pour sa politique d’aide publique au développement. La loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, promulguée le 4 août, prévoit qu’ « en 2025, 75 % des volumes annuels d’engagements de l’aide publique au développement bilatérale programmable française aient l’égalité entre les femmes et les hommes pour objectif principal ou significatif et 20 % pour objectif principal ».
Cet objectif est ambitieux : en 2022, la France a alloué 46,8 % de ses engagements d’aide bilatérale à des projets ayant pour objectif principal et/ou significatif l’égalité entre les femmes et les hommes, dont 5,9 % l’ayant pour objectif principal.
La loi développement solidaire introduisait également l’objectif d’allouer 0,7 % du revenu national brut à l’aide publique au développement en 2025. Le gouvernement français est cependant revenu sur cet engagement à l’été 2023, repoussant à 2030 l’atteinte de l’objectif du 0,7 %. Naturellement, même si les objectifs en matière d’APD genrée étaient tenus, ceux-ci étant exprimés en proportion de l’APD totale, ce report de l’atteinte du 0,7 % constitue également un manque à gagner pour les projets en faveur de l’égalité femmes-hommes.
En 2022, la France a consacré 0,56 % de son revenu national brut à l’aide publique au développement.
Compte tenu des niveaux, actuels et envisagés, de l’aide publique au développement de la France (0,7 % du RNB à l’APD en 2030) et de la proportion consacrée à la promotion de l’égalité femmes-hommes, en se basant sur les projections de croissance établies par le Fonds monétaire international et en supposant que la France tienne ses engagements, son aide publique au développement pourrait s’établir à 17,3 milliards d’euros en 2026, dont 1,8 milliards engagés directement pour l’égalité femmes-hommes. Les volumes cumulés d’engagements d’aide publique au développement de la France ayant pour objectif principal l’égalité femmes-hommes pour la période 2022-2026 s’établiraient à 6,6 milliards d’euros si elle parvenait à tenir ses engagements.
Il est à noter que le report de l’atteinte du 0,7 % entraîne, sur la période 2025-2030, un manque à gagner de 4,4 milliards d’euros pour les projets en faveur de l’égalité femmes-hommes, dont 1,2 milliard pour les projets l’ayant pour objectif principal.