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Quels pays donateurs soutiennent l’égalité femmes-hommes dans leur aide au développement ?

Publié le 13 mars 2024 dans Faits et chiffres

Dossier spécial sur l’état des inégalités femmes hommes-dans le monde en 2024 :

Ce décryptage des financements consacrés à l’égalité femmes-hommes est l’une des composantes d’un dossier spécial consacré aux inégalités de genre dans le monde en 2024.

 

En 2015, tous les pays de la planète ont pris l’engagement d’atteindre 17 Objectifs de développement durable (ODD) d’ici à 2030. Parmi ces objectifs, l’ODD 5 ambitionne de parvenir à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes et des filles du monde entier. Mais atteindre l’égalité des genres nécessite des investissements suffisants, en particulier dans les pays les plus pauvres.

L’aide publique au développement (APD) du Comité d’aide au développement (CAD) de l’OCDE constitue à cet égard une source importante de financement. À quelle hauteur les pays membres du CAD prennent-ils en considération la promotion de l’égalité femmes-hommes dans leur APD ? Quelle tendance est observée ces dernières années ? Décryptage.

 

L’égalité femmes-hommes, un enjeu sous-financé par les bailleurs

 

Le suivi de l’aide publique au développement (APD) en faveur de l’égalité est assuré par le CAD de l’OCDE, à l’aide du marqueur de la politique d’aide à l’appui de l’égalité femmes-hommes (voir encadré).

 


Objectif significatif, objectif principal : définitions

Dans le cadre de l’exercice annuel de notification de leurs apports d’APD au CAD, il est demandé aux pays donateurs d’indiquer, pour chaque projet/programme, si celui-ci est orienté vers l’égalité des sexes comme objectif de la politique d’aide en s’appuyant sur un système de notation à trois valeurs :
 

  • Objectif principal (Marqueur 2) : l’égalité femmes-hommes constitue l’objectif principal du projet/ programme et sa recherche détermine de façon fondamentale la conception de ce dernier et les résultats qui en sont attendus. Ce projet/programme n’aurait pas été entrepris en l’absence de l’objectif de l’égalité entre les femmes et les hommes.
  • Objectif significatif (Marqueur 1) : l’égalité femmes-hommes est un objectif important et délibéré du projet/programme mais elle ne constitue pas le principal motif de sa réalisation.
  • Non-orienté vers l’objectif (Marqueur 0) : le projet/programme a été examiné au regard du marqueur mais il n’a pas été constaté qu’il visait l’objectif de l’égalité femmes-hommes.

Source : OCDE (2016)

 

En moyenne, entre 2021 et 2022, les 31 pays donateurs du CAD et les institutions de l’Union européenne se sont engagés à orienter 64,1 milliards de dollars US par an, soit 43,3 % de leurs engagements d’APD bilatérale, vers l’égalité femmes-hommes et l’autonomisation des femmes et des filles. Sur cette somme, 5,6 milliards visaient l’égalité en tant qu’objectif principal (3,8 % de l’APD bilatérale), et 58,4 milliards en tant qu’objectif significatif (39,5 % de l’APD bilatérale).

Sur la même période, les membres du CAD ont décaissé en moyenne 57,8 milliards de dollars en faveur de l’égalité femmes-hommes (42,1 % de leurs décaissements d’APD bilatérale ventilable), dont 6 milliards en soutien à des projets l’ayant pour objectif principal (4,3 %) et 51,9 milliards pour des projets l’ayant pour objectif significatif (37,7 %).

 


Engagements, décaissements : clarification

Outre la base de données détaillées, l’OCDE communique les montants d’APD en faveur de l’égalité femmes-hommes et l’autonomisation des femmes exprimés en engagements, afin de refléter l’intention des pays donateurs. Ces engagements pouvant être pris sur plusieurs années, leur somme totale peut varier significativement d’une année à l’autre sans pour autant signifier un changement d’orientation, c’est pourquoi l’OCDE communique sur la moyenne de deux années.

 

 

 

En volume, les premiers donateurs d’APD en faveur de l’égalité femmes-hommes sont également les plus importants donateurs d’APD totale (Allemagne, Japon, États-Unis, France).

Pour autant, aucun pays n’a atteint l’objectif international d’orienter au moins 85 % de son APD en faveur de l’égalité femmes-hommes (même si les Pays-Bas s’en approchent, à 84,4 %), et seuls les Pays-Bas et l’Espagne consacrent au moins 20 % de leur APD à la promotion directe de l’égalité.

 

 

Depuis 2020, une baisse significative des engagements pour la promotion directe de l’égalité femmes-hommes

 

Entre 2021 et 2022, l’APD ayant l’égalité femmes-hommes comme objectif principal ou significatif a enregistré une hausse de 19 %. Cependant, elle est entraînée par un regain des engagements en faveur de projets ayant l’égalité comme objectif significatif (marqueur 1, +21 %), tandis que les engagements pour des projets destinés à la promotion directe de la parité (marqueur 2) ont enregistré un nouveau recul (-5 %, après -8 % en 2020 et -10 % en 2021).

Six des huit principaux donateurs d’APD totale ont vu leurs engagements d’APD consacrée à l’égalité femmes-hommes augmenter entre 2021 et 2022 (Japon, Pays-Bas, Royaume-Uni, Italie, Allemagne, États-Unis), tandis que deux les ont diminués (Canada et France).

 

 

 

 

La France, future championne de la promotion de l’égalité femmes-hommes dans le monde ?

 

La France se classe au 13e rang, ayant alloué 46,8 % de son aide bilatérale à l’égalité femmes-hommes en moyenne en 2021-2022. 5,9 % des montants alloués visaient la poursuite de l’égalité de genre comme objectif principal (0,6 milliard de dollars), et 40,9 % comme objectif significatif (4,2 milliards de dollars).

 

 

 

La France a promulgué le 4 août 2021 une nouvelle loi pour encadrer sa politique d’aide au développement : la loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales. Cette loi consacre l’égalité femmes-hommes et filles-garçons en tant qu’objectif transversal de l’APD française. Elle prévoit ainsi que 75 % des projets financés par l’APD de la France aient comme objectif principal ou significatif l’égalité femmes-hommes (selon le marqueur genre de l’OCDE) d’ici 2025, dont 20 % l’aient pour objectif principal. Cet engagement pourrait se traduire par 3,3 milliards d’euros alloués à la promotion directe de l’égalité en 2025, une somme cinq fois supérieure à celle consacrée en 2021.

La France se distingue cependant par son niveau de soutien aux organisations et mouvements de défense des droits des femmes et institutions gouvernementales, partie intégrante de sa diplomatie féministe. En moyenne en 2021-2022, elle leur a alloué 145 millions de dollars, loin devant le Canada, qui se classe deuxième avec 63 millions de dollars.

 

 

 

 

 

Lire aussi

Base de données de l’OCDE : projets d’aide visant l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (2002-2022) | OCDE

Documents à télécharger

Development finance for gender equality and women’s empowerment : A snapshot (en anglais) Rapport critique d’Oxfam : "Des projets en faveur de l’égalité femmes-hommes ?", février 2020 Rapport de Coordination SUD : "Diplomatie féministe : pour une APD genre à la hauteur des enjeux", février 2021 Base de données de l’OCDE : projets d’aide visant l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes (2002-2022) | OCDE